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15 mars 2012

Je ne suis pas Eugénie Grandet de Shaïne Cassim, à l'Ecole des Loisirs, médium

P1020973Voilà un petit roman ado que j'avais envie de lire depuis longtemps pour diverses raisons...

Déjà j'ai un cursus universitaire de littérature moderne ou Balzac à la part belle, alors même si mon coeur balance pour Mme Bovary, Eugénie reste une des héroïnes romantiques de mes années de fac !

Et puis mon cursus en art m'a aussi permis de connaître et d'apprécier le travail de la plasticienne Louise Bourgeois, notamment tout son travail autour d'Eugénie Grandet justement. Ce travail a débouché sur une exposition à la Maison Balzac, intitulée Louise Bourgeois : moi Eugénie Grandet... Il en est né aussi un petit livre du même titre, préfacé par Jean Frémont, le premier à avoir présenté , en 1958, l'oeuvre de cette artiste encore inconnue en Europe. Dans cet essai il souligne les point communs entre la vie d'Eugénie et celle de l'artiste, expliquant ainsi la genèse de l'art de Louise Bourgeois.  Ce petit livre que j'ai lu au printemps dernier, m'avait beaucoup marqué tant sur son côté très psychologique que sur le fragilité qu'il s'en dégageait... Et j'avais bien sur énormément regretté de ne pas avoir pu voir cette exposition. Pour plus d'info vous pouvez aller voir par ici !

Et voilà qu'à l'automne sort, dans la collection Médium de l'Ecole des Loisirs, ce roman! C'est donc en parfaite petite curieuse que je l'ai lu dès son arrivée à la médiathèque...

Alice est un ado parisienne plutôt normale, si tant est que sa mère est partie à l'autre bout du monde du jour au lendemain, que son père a peu de temps pour prendre soin d'elle, et surtout que sa soeur Anne-Louise, costumière de théâtre,  a un tempérament bien trempé et un caractère quelque peu fougueux qui fait parfois honte à Alice. Au bras d'Anne-Louise, Max jeune metteur en scène obsédé par la Cerisaie de Tchekhov. Tout commence lorsqu'Anne-Louise décide qu'elle ira visiter l'exposition Louise Bourgeois : Moi, Eugénie Grandet... en compagnie de sa soeur alors peu enthousiaste à l'idée. La veille Alice tente une plongée dans le roman de Balzac... en vain. Alors, elle ne s'attendait certainement pas à ce que cette exposition la bouleverse, et amorce un sacré tournant dans sa vie. A partir de ce jour Alice comprend qu'elle ne veut pas être Eugénie Grandet, elle ne veut pas passer sa vie à attendre...

" Je n'ai jamais grandi

Je me tiens près de la fenêtre

J'ai passé ma vie à faire des rideaux

Pour cacher les vitres sales

J'ai passé ma vie à faire des rideaux

En surveillant l'immeuble d'en face

J'ai passé ma vie à attendre *

C'est vrai ça, je l'ai compris en lisant hier soir; la vie d'Eugénie est passée d'un coup. Sans jamais avoir commencé. Elle croyait aimer et n'a pas été aimée en retour. Elle croyait vire et n'a pas vécu. Tout d'un coup je suis contente de n'avoir pas lu le roman jusqu'à la fin. Je crois que je n'ai pas envie de savoir que ce qui arrive à Eugénie dans les dernières pages. Je n'imagine que trop un dénouement affreux.

Pourtant, je sens que nous avons toutes la même peur que Louise, qu'Eugénie. je regarde encore une fois l'eucalyptus quand j'entends Anne-Louise formuler mes pires angoisses :

- N'est pas ce que nous craignons tous ? D'attendre trop longtemps que nos rêves s'exaucent ? [...]

*Louise Bourgeois Moi Eugénie Grandet, Gallimard/ Le Promeneur, 2012. "

Après cette partie sur l'exposition, a suivi, à ma grande surprise, une seconde partie qui n'avait pas grand chose à voir, sur la grand-mère des deux soeurs, une femme acariâtre que les deux jeunes filles vont apprendre à connaître dans la maladie... une sorte d'adage au "Il n'est jamais trop tard pour bien faire...".Puis vient une troisième partie centrée sur Max et sa mise en scène de la Cerisaie de Tchekhov. Cette troisième partie et cette fois-ci celle de création et de la réalisation des rêves de chacun . Le roman se termine sur la description de la pièce de théâtre dont les décors, détruits dans un incendie, sont remplacés par les images de la Russie qui ont marqué le monde, un moment poigant du roman... qui donne envie de trouver où voir cette mise en scène !

Voilà, finalement trois parties qui symbolisent le processus de la réalisation de nos rêves... Un roman plein d'espoir ! Mais qui semble un peu maladroit dans sa construction...

De plus, je trouve qu'une centaine de pages supplémentaires n'aurait pas été de refus, car les émotions si présentes dans la construction des personnages sont tout juste effleurées, j'aurais eu beaucoup de plaisir à lire par exemple plus de choses sur la mère des deux soeurs, sur la vie d'Anne-Louise elle même... Ce roman avait vraiment matière a être plus etoffé !

Bon après il est certain aussi, que cette lecture nécessite aussi quelques connaissances sur Eugénie Grandet, Louise Bourgeois, Tchekhov pour en saisir toute l'envergure. J'ai un petit peu eu l'impression que c'était un roman d'initiés pour les initiés, ce que je trouve vraiment dommage, surtout pour un roman pour ado ! Alors on peut toujours dire qu'il peut permettre de voir le roman de Balzac où la pièce de Tchekhov d'un autre oeil, je pense qu'il faut déjà avoir apprécié ces oeuvres pour apprécier Je ne suis pas Eugénie Grandet.

Bref, c'est un roman dont j'ai vraiment apprécié la lecture toute en fragilité et avec une nostalgie ambiante que l'on retrouve bien chez Balzac ou Tchekhov, mais tout coup de coeur qu'il soit, je trouve qu'il reste très intime, et mon âme de bibliothécaire est un peu frustrée car j'aurai du mal à le partager vraiment et à le conseiller...

 

(Désolée ce billet est méga long en fait... pour une fille qui a pas l'impression d'en avoir grand chose à dire...)

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Commentaires
L
il faudrait que je commence par relire Eugénie Grandet, tout court! je sais que j'ai beaucoup aimé, mais je n'en garde pas un grand souvenir...
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